Un des aspects qui rebutent bien des psychonautes est la saveur infecte et la toxicité de plusieurs des substances organiques. Il est courant de vomir lorsqu’on consomme de grandes quantités de peyotl, d’ayahuasca ou d’ibogaïne, mais cela est généralement intégré dans la cérémonie comme une forme de purification, de libération. Plusieurs Occidentaux seront refroidis par cet aspect de l’expérience. La saveur du San Pedro n’incite aucunement à le consommer. Il faut donc une attitude ferme et disciplinée. Mais, être prêt à tout pour avoir des visions donne assez de courage pour le manger consciemment. Les cultures indigènes prétendent par ailleurs que c’est le meilleur moyen qu’a trouvé Mescalitos, l’esprit lié à la mescaline contenue dans ce cactus, pour éloigner ceux qui ne sont pas prêt pour cette expérience. Mais le désir d’absolu dépasse, chez des explorateurs tels que moi, l’appréhension de l’inconfort physique lié à l’expérience et qui bien souvent en décuple les effets. La richesse de l’expérience compenser ainsi largement l’inconfort momentané.
La consommation de graines de gloire du matin et de rose des bois (hawaiian baby woodrose) s’accompagnent d’un mal de coeur persistant et d’une sensation de mal-être omniprésent. L’inconfort physique est dû à d’autres composés organiques présents dans la plante, mais il est toutefois possible d’intégrer ces aspects dans l’expérience. Ce type d’expérimentations à l’ancienne n’est donc pas si rapide et facile qu’elle peut sembler de prime abord, sauf qu’avec de la patience et de la dévotion on peut arriver à des résultats surprenants.
Inspiré par Castaneda, j’ai consommé de fortes doses de San Pedro, achetées légalement dans une boutique de Montréal. J’en ai profité pour m’initier à l’ethnobotanique. J’ai ainsi expérimenté le ayahuasca (que je fis cuire moi-même), les graines de rose des bois et de gloire du matin, la Salvia divinorum, le San Pedro, la datura et diverses herbes de rêve. Il est sage d’expérimenter en toute sécurité, d’être pragmatique et mature dans nos recherches tout en osant être téméraire pour repousser les limites.
Les graines de rose des bois contiennent des alcaloïdes psychotropes : l’ergine ou LSA, qui est très proche du LSD, mais aussi de l’isoergine et de l’ergométrine. Pour un effet psychédélique, on en avale entre 5 et 10 graines. L’inconfort physique est inhérent à l’ingestion des graines de rose des bois : mal de coeur, nausée, fatigue. Cela se traduisit dans mon cas par une angoisse et une détresse émotionnelle dont j’aurais bien pu me passer. Je me concentrai intensément sur mon troisième oeil afin de faire passer ma conscience dans mon corps subtil et enfin ressentir la beauté visionnaire du LSA et un bien-être métaphysique, mais les symptômes liés à mon mal-être physique me guettaient sans cesse. J’ai tenté l’expérience une seule fois et je ne le regrette pas. Les révélations ont favorisé l’apparition de nouvelles idées et un nouvel angle de vue sur la réalité. Toutefois le malaise physique fut assez intense pour me décourager d’aller plus loin dans cette voie. Je fus submergé de visions de fractals aux couleurs pastel magnifiques accompagné d’une note de musique continue, ou plutôt d’un ton qui perdura 24 heures. Tout s’écroula puisque ma construction du réel était en fait désuète, superficielle. Je venais en plus de lire Cosmic Trigger de Robert Anton Wilson, un livre-culte assez puissant en lui-même pour provoquer une expérience psychédélique. Mais lorsque la toile du réel se déchire ainsi, on perd pied quelques instants et lorsque finalement on retrouve l’équilibre, on est plus stable que jamais.
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